Scène 6 (Cont.10)

Patrizia : Et ça vous a plu ?
Madame H. : Si ça m’a plu ? Comment vous expliquer… Je me souviens de leurs mains, de leur bouche, de leur souffle. Du noir et du soleil qui se lève à l’intérieur. Si ça m’a plu ? Si ça m’a plu !
Elle rit.
Je me suis construite autour de ça, baiser, quel vilain mot. J’ai annulé des rendez-vous importants pour « baiser » comme vous dites. Je me suis réveillée à des quatre heures du matin. J’ai pris ma voiture. J’ai roulé pendant des heures… Baiser… On devrait dire, se démultiplier ou se dissoudre, c’est ça, se dissoudre. Ou alors, s’envoyer en l’air. J’aime bien, s’envoyer en l’air, on ne décolle pas comme ça, d’un seul coup, il faut de l’élan, il faut de la vitesse…
Patrizia : … Du carburant et un avion…
Madame H. : … Ou une ficelle et un cerf-volant. On s’envole aussi avec un peu de vent.
Patrizia : … Parce que maintenant il faut un brevet de pilote pour s’envoyer en l’air.
Madame H. : Alors, je cours. J’adore courir, vous comprenez.
Patrizia : Oui, pour faire le raton-laveur.
Madame H. : Non, pour faire voler mon cerf-volant.
Patrizia : Une petite fille de 54 ans.
Madame H. : Non. Une grande fille de 54 ans. Une grande fille qui joue sur la plage, avec un seau, une pelle et un cerf-volant.
Patrizia : Vous pensez jouer encore longtemps ?

Auteur : Nicolas Esse

Depuis 1962, je regarde les nuages qui passent avant d'aller mourir.

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