Devant moi l’eau turquoise
et les vagues qui surfent l’horizon glacis de noir, oultremer, vert de glace et vert de gris. L’océan ondule et déroule ses anneaux, son dos souple parcouru de frissons, son dos se creuse jusqu’au fond de la croupe, son dos se soulève; l’océan, c’est le ciel couché sur le ventre et les vagues qui le traversent le miroir de l’écume des nuages.
C’est un jour bleu et blanc de l’autre côté de la terre. Ici, il est midi en décembre et le soleil accroché dans le ciel est bloqué sur juillet. Dans le vent du large qui remonte vers la plage, il y a l’odeur chaude du sable séché, des bouffées de tabac blond et d’ambres solaires qui vont de la noix de coco au parfum de framboise. Les corps brillants, de toutes les couleurs, tombants, tendus, étendus, dressés vers le ciel au point de chute de la courbe d’un ballon. La ligne claire et croisée qui délimite le pourtour de quatre paires d’abdominaux : il suffit de deux mains pour faire le tour de cette taille; pour celle-là, deux bras ne suffiront pas. Les baseball caps côtoient les cowboys hats sous le regard impassible des mouettes qui planent en vol stationnaire.
L’humanité éphémère passe, vêtue de strings et d’ambre solaire. L’humanité bronzée, rôtie, pâle, en lunettes de soleil, arrosée de bière et de décibels, dans le froissement éternel des vagues que l’océan indifférent continue d’étendre sur les longs fils du vent.