La véritable origine de l’automne (44)

– Et si je veux quand même avoir des enfants ?
– Il n’y aura pas d’enfants, Ève. À partir de maintenant Je serai plus vigilant.
– Qu’est-ce que ça veut dire, vigilant ?
– Je vais garder un œil sur le petit serpent.
– Un œil ? Sur mon petit serpent ? Et puis quoi encore ? Mon petit serpent est à moi. Rien qu’à moi. Mon petit serpent n’aime pas être observé. Mon petit serpent est fragile de l’intimité.
– Tu n’auras qu’à bien le protéger.
– Tu l’as déjà dit cent fois.
– Tu l’as déjà oublié cent fois. Alors dis-moi Adam, à partir de maintenant, est-ce que je peux vraiment compter sur toi ?
– Oui mon capitaine, tu peux compter sur moi. Promis, juré, craché.

Dans un souffle, Dieu s’en est allé.
Ève regarde Adam qui regarde ailleurs. Il pense à l’éclair rouge qui l’a traversé tout à l’heure. En un quart de seconde, il est parti dans un autre monde, très loin, très haut, avant de se déchirer, de s’ouvrir de l’intérieur. Il entend encore le son sec de cette déchirure dans la tête, la poitrine qui se fend, le craquement qui remonte le long de la nuque et vrille le cerveau. Le vol. La chute longue et libre, et à la fin, cet atterrissage beaucoup trop précipité. Dieu l’a intercepté quand il planait encore à dix-mille mètres au-dessus du niveau de la mer. Sur le dos. Sur le ventre. En piqué. En chandelle. Les bras écartés et la tête appuyée contre le dos du ciel.

Maintenant qu’Il est parti, on pourrait recommencer ?

Auteur : Nicolas Esse

Depuis 1962, je regarde les nuages qui passent avant d'aller mourir.

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